Désextinction et espèces disparues : limites et promesses d’une science émergente

La perspective de faire revivre des espèces éteintes n’est plus présentée uniquement comme fiction scientifique, selon des chercheurs qui travaillent sur la désextinction. Cette science émergente suscite des espoirs, mais aussi des questions sur son utilité réelle et sur les conditions qui permettraient de protéger la biodiversité. Le livre Faire revivre les espèces disparues ? de Lionel Cavin et Nadir Alvarez, réédité chez Quanto, récapitule ces débats. Cavin dirige le Muséum d’histoire naturelle de Genève et Alvarez dirige le Muséum cantonal des sciences naturelles du canton de Vaud.
Réalité et limites d’une approche nouvelle
Pour les auteurs, la désextinction ne relève pas d’un miracle spectaculaire et ne peut être réduite à une réponse automatique à l’extinction. Le livre rappelle que l’idée est née d’une réflexion sur ce que signifie sauver des espèces, mais que les scénarios envisagés ne correspondent pas à une restauration fidèle des espèces disparues.
Le cas du loup sinistre et ce que signifie une démonstration technique
Concernant le loup sinistre, Alvarez précise que ce serait, en pratique, un organisme génétiquement modifié à partir d’un loup gris, comportant un ensemble de modifications ponctuelles. Il souligne que, même s’il s’agit d’une prouesse technologique, cela ne peut pas être considéré comme une désextinction au sens scientifique du terme. À ses yeux, on aboutirait plutôt à une chimère vivante dont le génome est partiellement ajusté.
Enjeux économiques et implications éthiques
Le livre insiste sur l’idée que l’enjeu majeur est financier, avec des projets qui évoluent dans des budgets considérables et qui privilégient des espèces emblématiques comme le mammouth pour attirer l’attention du public. L’objectif affiché ne serait pas de freiner l’effondrement de la biodiversité, mais de générer des retombées médiatiques et économiques autour de ces recherches.
La génétique et ses perspectives d’application
Les auteurs rappellent que les avancées en génétique pourraient trouver des usages utiles dans d’autres domaines, comme l’agronomie ou la médecine. Selon Alvarez, le véritable plan d’affaires serait de diversifier les usages et les marchés plutôt que de ressusciter des espèces éteintes, et toute recherche n’est pas nécessairement mauvaise, même si le décalage entre annonces et résultats réels peut être conséquent.
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