Genève : huit Suisses de la flottille pour Gaza dénoncent les traitements et l’inaction de Berne

Genève : huit Suisses de la flottille pour Gaza dénoncent les traitements et l’inaction de Berne

Retour des participants à Genève et premiers éléments de témoignage

À leur arrivée à l’aéroport de Genève, dimanche après-midi, les huit citoyens suisses ont pris part à une déclaration commune dans laquelle ils expliquent avoir été victimes de tortures et d’exactions lors de leur détention en Israël, sans apporter davantage de précisions tant que d’autres militants restent emprisonnés. Ils ont annoncé qu’une déclaration exhaustive serait publiée à leur retour.

Ils se disent également particulièrement préoccupés pour leurs camarades encore détenus en Israël, selon eux en raison d’une inaction perçue de la Suisse et du DFAE, et attribuent cette situation à ce qu’ils décrivent comme une influence pro-Israël d’un responsable. En parallèle, ils ont salué le soutien de la Turquie qui a permis leur rapatriement via Istanbul.

Selon leurs propos, la seule aide reçue de la part des autorités suisses aurait consisté en la présence du vice-consul à l’aéroport d’Istanbul pour chacun et à des frais d’émoluments à rembourser, jugés insuffisants par les participants.

Réaction du DFAE et position des autorités suisses

La directrice des affaires consulaires du DFAE, Marianne Jenni, a répliqué que le minimum n’avait pas été assuré et a rappelé aux autorités israéliennes leur obligation de respecter les droits fondamentaux des prisonniers. Elle a aussi insisté sur la responsabilité individuelle des participants et averti que ce type d’action comporte des risques.

Témoignage du responsable helvétique du navire Wahoo

Environ deux heures après son arrivée, le poète et écrivain tessinois Vanni Bianconi, à la tête du navire suisse Wahoo au sein de la flottille, a livré à Forum RTS son récit des attaques en Méditerranée et de la détention dans le désert israélien.

Il indique avoir traversé une épreuve lourde et décrit les conditions constatées à Ashkelon puis dans la prison de Ktzi’ot, où les détenus auraient été traités de manière brutale et privés de moyens de communication et de soins. Détails rapportés évoquent des périodes d’attente sous haute chaleur, des déplacements forcés entre cellules et des difficultés d’accès aux médicaments nécessaires pour des malades comme les asthmatiques ou les diabétiques.

Le récit évoque aussi des actes coercitifs et des contrôles stricts, avec des difficultés à obtenir des documents ou une représentation légale, et une observation générale d’un traitement lourd réservé à ce groupe de militants, selon lui.

La perception de l’action suisse et le contexte diplomatique

Comme d’autres participants, Vanni Bianconi savait dès le départ que l’intervention du DFAE serait limitée. Cela n’en demeure pas moins une critique du comportement de l’État vis‑à‑vis de cette initiative civile, qui, selon lui, demeure protégée par le droit international et mérite une réaction plus forte de la part des autorités suisses et de la communauté internationale.

Objectifs et portée de la flottille Global Sumud

Pour le responsable helvétique, l’opération Global Sumud Flottilla est estimée comme une réussite en ce qu’elle permet de mettre en lumière un volet des actions israéliennes souvent moins médiatisé. L’objectif principal était de démontrer que des citoyens, et en l’occurrence des Suisses ou des ressortissants internationaux, peuvent entreprendre des démarches légales pour sensibiliser l’opinion publique et influencer les gouvernements.

La seconde ambition, selon lui, est d’agir comme un catalyseur de mobilisation populaire, en espérant que les réactions observées dans des villes européennes et ailleurs se poursuivent en Suisse et sur le continent. Il estime que la vague de soutien observée au moment des arrestations pourrait accompagner une dynamique forte dans les rues et dans les lieux de travail pour faire pression sur les gouvernements afin d’obtenir des réponses et des mesures concrètes.

Des Suisses encore détenus et le suivi consulaire

Au total, 19 Suisses et Suissesses faisaient partie des plus de 400 passagers des 41 navires interceptés au large de Gaza. Un participant était déjà arrivé à Zurich le samedi, et dix autres, dont l’ancien maire de Genève Rémy Pagani, figurent parmi les quelque 300 personnes encore détenues par Israël.

Une équipe de l’ambassade de Suisse à Tel‑Aviv s’est rendue dimanche matin à Ktzi’ot pour une seconde visite. Le DFAE confirme que ces dix personnes sont « relativement en bonne santé compte tenu des circonstances » et n’a pas communiqué de date de retour.

Pierrik Jordan — Propos recueillis par Thibaut Schaller et Coralie Claude